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Succession : Déshériter ses enfants ? – sur un air de Johnny Hallyday

La question a été posée avec quelque indécence dans toutes les revues people à la suite du décès de Johnny Hallyday et des problèmes successoraux dont les media se sont fait l’écho avec plus ou moins de clarté, préférant privilégier le scandale plutôt que d’indiquer les vrais fondements juridiques du débat.

Dans nos pays latins qui sont tous empreints du droit romain, la loi successorale pose le principe de « la réserve héréditaire ». Cela limite la volonté du défunt de disposer complètement de ses biens et préserve ainsi la transmission du patrimoine des générations anciennes vers les plus jeunes.

Les pays de droit anglo-saxon ne connaissent pas cette limite. Et donc le défunt peut effectivement préparer le partage de ses biens en évitant toute transmission à ses enfants.

Succession : Quel est le droit applicable ?

Le problème est de savoir si le droit successoral est un droit attaché à la nationalité du défunt, ou à son lieu de résidence, ou encore un droit territorial en fonction de l’emplacement des biens composant le patrimoine successoral.

Epargne

Epargne représentant l’héritage pour la succession

Une réponse a été apportée par un règlement européen du 4 juillet 2012, applicable dans la législation française depuis le 17 août 2015 ; cette disposition prévoit que les règles encadrant la succession d’un ressortissant de l’union européenne seront celles de l’état où le défunt avait sa résidence et non celles du pays dont il est originaire.

Ainsi, si l’on considère que le chanteur à succès demeurait de manière habituelle aux Etats-Unis, quand bien même une large partie de ses actifs se trouve en France, c’est la loi américaine qui doit s’appliquer avec, à la clé, l’absence de toute réserve héréditaire…

La notion de résidence du défunt pour la succession

Mais le problème peut encore se compliquer lorsque, bien que résidant dans un état donné, le défunt présentait lors de son décès « des liens manifestement plus étroits avec un autre état »…

C’est là que toutes les interprétations sont permises. Il faut analyser soigneusement dans les faits la nature du choix fait par le défunt. S’agissait-il seulement d’une résidence fiscale, ou d’une vraie résidence d’intérêt personnel ou culturel ?
Quels étaient les liens de Johnny Hallyday avec la France ? Ou avec la Suisse ?…
Quelles ont été la nature de ses dernières dispositions testamentaires et surtout peuvent-elles être retenues selon la législation sous laquelle elles ont été prises, sans contredire les effets du fameux règlement européen ?

En définitive et pour faire simple, quel choix (écrit ou comportemental) Johnny Hallyday a-t-il fait selon les critères du règlement européen ci-dessus cité ?
Le doyen CARBONNIER aurait répondu, non sans humour : « A chacun sa famille, à chacun son droit »…

Gageons que de belles joutes oratoires vont s’ouvrir des deux côtés de l’Atlantique. Et qu’après quelques longues années de procédure, l’un des deux clans pourra tristement méditer la célèbre pensée de Cicéron (Traité des devoirs) que l’on retrouve dans tous les ouvrages de philosophie du droit : « le meilleur héritage et le plus riche patrimoine qu’un père puisse laisser à ses enfants, c’est la gloire de ses vertus et de ses belles actions ».

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